Skip to content
ACTU NICE
02/11/2022

Qui est César Malfi, ce « maestro » du street art qui vient de signer une fresque géante à Nice ?

César Malfi est un street artiste niçois qui met ses œuvres « au service de la société ». Il vient de terminer une fresque murale géante dans le quartier des Moulins.

A 27 ans, le jeune street artiste niçois enchaîne les projets artistiques. Il souhaite notamment se développer davantage à l’international et travailler avec les musées. (©MR/Actu Nice)

« Si cette œuvre devrait réexister, comment elle serait ? » C’est à peu près la question que se pose quotidiennement César Malfi, et pour laquelle les réponses sont infiniment nombreuses. Depuis plusieurs années, ce jeune niçois a su se frayer un chemin dans le paysage artistique local et bien au-delà.

Après 10 jours de travail, il vient de signer une fresque géante, inspirée de Marianne, de Catherine Ségurane et de la déesse Nikaia, sur une façade d’un immeuble dans le quartier des Moulins à Nice (Alpes-Maritimes).

 

Réflexion artistique et pédagogie

 

C’est dans une nacelle de chantier, perché à des dizaines de mètres du sol, que le street artiste aura passé plus de 80 heures. Intitulée Liberté, égalité, féminité, cette œuvre peinte à la bombe sur 12 mètres de haut et 10 mètres de large incarne l’engagement de César Malfi pour le droit des femmes. 

fresque géante dans le quartier des Moulins à Nice

Loin de lui l’idée de faire du simple graffiti, cet artiste urbain souhaite apporter sa réflexion sur le monde contemporain en adoptant une vision plus « pédagogique » de la discipline. Car c’est incontestable : longtemps associé à l’illégalité et à des actes de vandalisme, le street art a été difficile à démocratiser.

Il fallait alors lui donner une autre dimension, lui permettre de faire passer des messages et de parler au « grand public ». Presque logique, alors que ce mouvement artistique est né dans la rue. César Malfi fait ce qu’il sait faire de mieux : prendre le contre-pied d’une actualité parfois morose et mettre ses œuvres « au service de la société ».

 

« J’ai un lien étroit avec l’Italie, ce sont mes origines. J’ai eu un mentor qui m’a amené dans les musées pour me faire découvrir l’art, et plus particulièrement la période de la renaissance italienne. J’avais 6 ou 7 ans et c’est avec lui que j’ai commencé à faire mes premiers dessins, il m’a toujours appris à vivre l’art en me questionnant. La trame directrice de tout le travail, c’est de se demander pourquoi cette œuvre et jusqu’où elle peut aller. »
César Malfi – Artiste urbain

 

« Je me suis dit que je n’allais plus parler de la même chose »

Dès l’âge de 15 ans,  il se met à taguer dans les rues de Nice ou dans « les maisons abandonnées » avec sa bande de potes. Jusqu’au jour où le jeune artiste frôle la mort en s’électrisant : « On est allé sur une voie ferrée, on voulait faire la plus grosse peinture qui avait jamais été faite dans notre secteur et ça demandait de prendre des risques, retrace-t-il. On a commencé à peindre avec des grandes perches et j’ai tapé la mienne dans les câbles électriques du train ».

Un accident qui lui aura valu une semaine d’examens cardiaques, plusieurs brûlures et trois mois de béquilles. C’est aussi pour cela qu’il aime le graffiti, pour « l’adrénaline et le challenge ».

Mais cette anecdote s’impose finalement comme le point de départ d’une nouvelle manière de dessiner. « J’ai vu ma vie défiler, raconte le Niçois. Je me suis dit que je n’allais plus parler de la même chose, que je n’allais pas mettre ma vie en jeu uniquement pour moi. C’est quand on perd l’existence que l’on se rend compte du poids que l’on peut avoir en existant ». 

Découvrez le Street Artiste César Malfi
Cet artiste urbain a également réalisé une fresque sur le campus Saint-Jean d’Angély d’Université Côte d’Azur. (©César Malfi)

« C’est là que la mission s’accomplie pour moi »

César Malfi puise son inspiration dans les grands chefs-d’œuvre. Son créneau ? Les réinterpréter en les adaptant au contexte actuel. L’Histoire : « c’est ce qui fait battre [son] cœur ». Il veut redonner tout son sens au street art, celui de l’entretien du lien social.

 

« Je crée énormément en fonction du spectateur et du lieu où je vais peindre. Le développement du droit des femmes – même si ce mot ne devrait même pas exister – est une cause que je défends. Avec l’actualité en Iran par exemple, il y a un vrai message à faire passer et c’est pour ça que cette fresque représente tout ce qu’il y a de plus fort chez une femme. Dans ce quartier, cela a du sens car on fait face à un public qui n’a pas accès à l’art. Le but, c’est aussi de leur amener de nouvelles perceptions de la vie. »

 

Durant sa réalisation aux Moulins, sur l’avenue Martin Luther King, tous les gamins du quartier l’interpellent. « Cela se voyait qu’ils n’avaient jamais vu ce type d’œuvre. C’est là que la mission s’accomplie pour moi. »

Le choix du lieu n’est évidemment pas anodin. A quatre rues d’ici se trouve le commissariat du secteur. « Il y a deux mondes qui les séparent avec deux ambiances différentes, se souvient l’artiste. C’est une zone sensible et c’est aussi ce qui fait que l’œuvre y a toute sa place. »

 

Sortir le street art de la rue ?

 

Mais son terrain de jeu n’est pas seulement l’espace public et César Malfi sait également faire le grand écart : il a notamment investi les murs du Château de Crémât, un domaine viticole luxueux construit en 1906, avec une fresque qui fait référence à l’Histoire de Nice. « Je me suis demandé comment on pouvait transposer le street art de la rue à un lieu ultra protégé comme un château. Et ce lien, il se fait par l’humain et le sens que l’on donne à son œuvre », dit-il.

A 27 ans, il n’a qu’une ambition : laisser sa trace, rendre l’art accessible à tous. « C’est ce pourquoi je le fais, ce qui me motive à me lever le matin ». Cet autodidacte – il n’a suivi aucune formation artistique – s’est formé « par la vie ». C’est d’ailleurs là que son art prend finalement tout son sens : il s’adresse à tout le monde. L’un de ses collaborateurs va jusqu’à le surnommer « Maestro », tant sa technicité est « quasi parfaite ». 

 

Plusieurs autres projets sont en cours : se rendre en Amérique du Sud et travailler avec l’une des pâtisseries niçoises les plus emblématiques. Des collaborations qui demandent des mois de travail en amont.

En mars prochain, il exposera ses œuvres au Musée d’Archéologie Nice-Cimiez, dans son quartier d’enfance. « A la maison », sourit César Malfi.

 

 

Par Manon REINHARDT